Actualités / Cultures - mardi 22 janvier 2013

Un poing, c’est (trop) court !

DE L’HUMOUR, de la tendresse, quelquefois mais plus rarement, un certain cynisme : les réalisateurs d’aujourd’hui, formés aux plus grandes écoles du cinéma, décrivent à travers leurs productions un univers ni vraiment désenchanté, ni très combatif. Mais profondément humain. Du 11 au 19 janvier, les amateurs de courts métrages qui ont fréquenté les salles ont vécu huit jours intenses lors de cette treizième édition du festival.

Pour les jurys, le tempo a été donné dès le premier week-end du festival. Dès le samedi 12 et jusqu’au dimanche 13, ces cinq jurys – adultes, jeunes, grandes écoles, professionnels et presse – se sont retrouvés matin et soir devant l’écran des Amphis. L’ambiance était à la fois attentive et conviviale pour visionner les vingt-six courts métrages, proposés en quatre séances de compétition... “Nous avons vu de très bonnes réalisations. La programmation était de grande qualité”, ont souligné plusieurs membres des jurys professionnels et presse. Parmi eux, Jean-Caude Mercier, ingénieur son qui a longtemps travaillé dans le cinéma et pour la “pub”, a remarqué l’intelligence des scénarios et le souci des plans et des détails qui font la saveur du cinéma : “La maîtrise de l’outil est bien là, de la part de ces jeunes réalisateurs qui viennent des grandes écoles de cinéma”.

Beaucoup de réalisatrices

Nombre d’entre eux sont... des réalisatrices, et cette remarque vaut pour les films primés. A commencer par le grand prix, attribué à Rae, un film d’Emmanuelle Nicot, qui parle avec tact des violences faites aux femmes, en leur donnant la parole dans un foyer d’hébergement. L’an passé déjà, ce sujet avait retenu l’attention du jury, et le grand prix avait été décerné à un film qui évoquait les violences intrafamiliales et les mariages forcés. Autres sujets d’actualité retenus dans ce palmarès 2013 : la maladie d’Alzheimer. La liste, court métrage de Catherine Breton, a reçu le prix du meilleur scénario. Une histoire presque sans parole, mais non sans lucidité, inspirée du vécu de milliers de personnes confrontées à cette maladie incurable : comment mourir dans la dignité ? Le jury presse a remarqué Je vous prie de sortir, de Valérie Théodore, qui met en scène un clochard dont la vie bascule, le temps d’un dîner, dans l’univers chic et fermé d’une brasserie luxueuse. Les regards échangés entre le faux écrivain un peu débraillé et la serveuse en disent plus que de longs discours sur les critères qui fondent la reconnaissance sociale. Le regard que portent les réalisateurs aux questions de société n’est ni tout noir, ni tout blanc : c’est ce qui ressort de l’ensemble du palmarès, et notamment de A new old story, d’Antoine Cuypers. Un court métrage dont le chanteur Arno et Sophia Leboutte se font les interprètes inspirés, au service des jeux et des affres de l’amour, entre passé et présent.

L’hommage aux pays francophones a été primé avec Baby blues, un film canadien émouvant sur la détresse d’une jeune mère célibataire ; Argile, avec la grande actrice Edith Scob, s’attaque avec délicatesse aux rapports entre une vieille femme artiste et aveugle, et son jeune modèle. Non sans trouble ni ambiguïté, tout comme Wash the car d’abord, un film burkinabé, qui exprime avec justesse l’éveil de la conscience syndicale à travers le portrait d’un ex-cultivateur, employé dans une mine de zinc.

Ce palmarès ne serait pas complet s’il n’évoquait Les chancelants, un film de Nadine Lermite, sélectionné par le jury jeunes. Il s’agit d’une fiction remarquablement interprétée (par Jonathan Genet et Ana Girardot) sur l’autisme. Tout sonne juste dans ce film de vingt-cinq minutes : la détresse du jeune autiste qui crève l’écran, la difficulté des rapports noués au sein de l’institution qui l’accueille. La beauté et la violence qui se dégagent des images très maîtrisées de ce film ne laisse personne indifférent.

Une équipe de bénévoles engagés

Durant la semaine, les projections ont repris de plus belle au bénéfice des scolaires et lors des soirées thématiques. Seul bémol, la faiblesse du cinéma africain présenté lors de la soirée Carte blanche à Douala. Les scolaires, principalement venus des écoles et collèges de la ville, ont été près de trois mille cinq cents à visionner des fictions et des films d’animation. Souvent en présence des réalisateurs qu’ils ont pu ensuite questionner comme des grands. Il faut dire qu’ils étaient bien préparés, munis des remarquables cahiers pédagogiques préparés par Sophie Fueyo, enseignante et bénévole pour le festival. La petite équipe d’Un poing, c’est court doit beaucoup à ces bénévoles qui assurent l’accueil du public, la logis- tique, le visionnage des films, l’encadrement des jurys... Tous sont heureux de voir que la notoriété du festival ne cesse de croître. “Nous recevons de plus en plus de films de qualité”, remarque Nicole Garnier, la présidente. De quoi nous mettre en appétit cinématographique pour la prochaine saison 2014...

Françoise Kayser

Site : www.unpoingcestcourt.com

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