Actualités / Société - mercredi 05 février 2014 - (6 images)

Santé mentale : des réseaux et des manques

ÇA N’ARRIVE PAS qu’aux autres. Un parent en dépression, un ami qui fait une tentative de suicide, un jeune qui s’enferme chez lui, un collégien qui consomme du haschich en guise de petit déjeuner... Que faire, à qui en parler, comment et où se soigner ? Ces questions, nous les avons posées aux professionnels locaux de santé. Plusieurs soignants le soulignent d’emblée : l’augmentation de ces souffrances se mesure déjà à l’augmentation des demandes qui sont faites à tous les acteurs de la santé mentale dans la ville : médecins, infirmiers, assistants sociaux, psychologues... Beaucoup de structures publiques sont impliquées dans le champ de la santé mentale, qui est devenu un enjeu à la fois sanitaire, social et économique. Le rapport d’une Mission locale spécifie qu’aujourd’hui, il s’agit de “dépasser la santé dans son acceptation classique de réparation et de prévention de la maladie (psychiatrique). Si certaines formes de mal-être ne sont pas de la maladie mentale, elles doivent cependant être prises en compte”. Les maladies psychiatriques, quant à elles, recouvrent des pathologies hétérogènes, notamment la schizophrénie, les conduites suicidaires ou les troubles du comportement. A Vaulx-en-Velin comme dans toute cité, les dispositifs d’accès à la santé mentale sont rodés, avec des prises en charge qui peuvent être reconduites d’une année sur l’au- tre, de la simple consultation à l’hospitalisation, partielle ou temporaire. Selon les troubles psychiques, selon leur gravité, leur fréquence, leur nature, médecins et infirmiers savent orienter, conseiller, et soigner. La majorité des prises en charge se fait en ambulatoire, ce qui laisse au patient la possibilité de se déplacer, voire de mener une vie active.

Zoom sur le réseau

Le réseau local de soins en santé mentale est organisé autour du pôle hospitalier du Vinatier. Certaines structures sont sur place à l’hôpital – urgences, traitement des affections les plus lourdes, permanences sur le suicide – quand d’autres sont implantées au cœur de la ville.

La première de ces structures, c’est le Centre médico-psychologique (CMP), pivot du soin psychique pour adultes et enfants. Les deux CMP vaudais sont situés en plein centre ville, les prises en charge sont gratuites, sur rendez- vous, et bien sûr sous le couvert du secret professionnel. Vient qui veut, certes, mais avec quel délai d’attente ? “On essaie de donner un premier rendez-vous dans les quinze jours, explique Sébastien Kibler, cadre-infirmier au CMP adultes. Cela permet d’orienter les patients. Mais s’il a besoin d’un suivi psy, le délai varie de six mois à un an”. Sébastien Kibler travaille dans les trois structures publiques de la Ville pour les adultes : le CMP, le centre de jour et le centre d’accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP).

Le centre de jour : l’appellation est discrète ; il s’agit d’un petit établissement hospitalier (20 places) installé en pied d’immeuble dans le quartier de l’Ecoin. Il accueille les malades “en jour- née, sur indication médicale et dans le cadre d’une prise en charge de groupe”. Enfin, le centre d’accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP) propose, lui, toute la semaine des activités – de la cuisine au photolangage – qui visent à rendre autonome, voire resocialiser les personnes. Il est installé dans les mêmes locaux que le centre de jour, avec ses espaces et une équipe multidisciplinaire, tout comme les deux autres structures : médecins, infirmiers, psychologues...

Dans le dernier rapport national sur la santé mentale(1), les manques et les difficultés que rencontrent soignants, patients et tous les acteurs de la santé sont pointés. Notamment les disparités qui “demeurent en matière d’offre et d’organisation des soins (psychiatriques) entre les territoires”. A Vaulx-en-Velin, ces disparités sont aggravées d’une part par la pauvreté et la saturation des structures publiques, d’autre part par le manque de médecins en libéral. Ceci expliquant, au moins en partie, cela...

“Les sous-effectifs, c’est un vrai problème”
”Les sous-effectifs à Vaulx, c’est un vrai problème”, souligne Michèle Pacaud-Troncin, médecin référent au CMP. Avec près de 900 personnes suivies chaque année par elle ou ses confrères, le CMP est saturé. Chaque patient peut être vu une dizaine de fois. En tout, ce sont 7000 entretiens qui ont été menés en 2012. Mais des personnes renoncent à recourir à des soins ou bien arrêtent les traitements. Inutile de chercher à recourir à un psychiatre en cabinet privé: “Il y avait bien une psychiatre en libéral, elle est partie”, commente un soignant. Alors qu’il y a 41 de ces médecins spécialistes dans le 2e arrondissement de Lyon, on en compte 8 à Villeurbanne, 3 à Bron et aucun à Vaulx-en-Velin.
“Cela fragilise beaucoup le dispositif de santé mentale”, estime la spécialiste, d’autant plus que même les généralis- tes sont rares. Or, dans bien des cas, ils peuvent assurer le relais des traite- ments préconisés par les structures spécialisées.

Pour pallier ces problèmes récurrents, un service Psy Mobile a été créé en 2012. Rattaché au Vinatier, il fait des interventions dans tout le Rhône, pour les adultes souffrant de graves troubles psychiques et ne parvenant pas à accéder aux centres spécialisés. C’est souvent l’entourage, un bailleur ou un service social qui fait la demande. Le service intervient alors au domicile, en présence du tiers demandeur. Le docteur Pacaud-Troncin travaille aussi au sein de cette équipe et lance un véritable cri d’alarme : “Nous rencontrons de plus en plus de personnes qui n’ont jamais consulté. Et sur la ville, ces interventions du service Psy Mobile sont bien plus fréquentes qu’ailleurs”.

Françoise Kayser

Crédit photos © Marion Parent

(1)Rapport Robillard, commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, la santé mentale et l’avenir de la psychiatrie, décembre 2013.

 

Des rendez-vous, des contacts

Première rencontre de la Coordination 69 soins psychiques et réinsertions,

Sur le thème : maladies psychiques et parcours de vie, entre ruptures et continuité, interrogeons nos représentations et nos pratiques.
Public : professionnels, familles, proches et malades.
Le 17 février, à l’université Jean-Moulin, Lyon 3e.

Gratuit mais inscription obligatoire sur le site www.Coordination69.asso.fr

Semaine d’information sur la santé mentale

Sur le thème “Information et santé mentale”, différentes questions sont abor- dées : comment trouver une information de qualité sur la santé mentale et les troubles psychiques ? L’utilisation d’Internet permet-elle de mieux s’informer, se soigner et s’entraider ? Comment faire évoluer les stéréotypes sur les troubles psychiques ? Du 10 au 23 mars.

- Projection du film “Festival A vos a priori”, le 13 mars à 15h. Gem Envol et Cie, 140 rue de la Poudrette, Villeurbanne.
- Addictions, mieux comprendre et mieux informer, le 20 mars au Centre social Levy. Tel : 04 78 80 51 72. En collaboration avec Lieu écoute, Slea, les centres sociaux de la ville.

Quelques numéros utiles :

Centre médico psychologique pour adultes : 04 37 45 17 80. Centre médico psychologique pour enfants: 04 37 45 17 87. Lieu Ecoute Ressources Adolescence : 04 78 80 81 59. Maison des adolescents du Rhône : 04 37 23 65 93.

Psy Mobile : 06 69 20 66 55.
Centre de prévention du suicide : 06 67 94 00 99.
Pour plus d’informations, contacter le service municipal de promotion de la Santé, qui coordonne le Réseau vaudais santé : 04 72 04 80 33.

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