Archives / Journal N°54 - mardi 19 juin 2012

Marhaba, le deuxième exil

La ville a offert son livre à tous les habitants de la cité. Et l’auteur était présent le jour de la fête des voisins, pour une rencontre signature organisée avant le repas partagé. Avant de goûter aux spécialités des uns et des autres, plats de Pologne, du Maghreb, sardines grillées comme au Portugal... Gérard Chabenat a remercié tous ceux qui lui ont donné cette nouvelle occasion d’écrire. En premier lieu, les habitants de “la cité des étrangers” – parce qu’il fallait être de nationalité étrangère pour venir habiter ici – “ce village où une vraie sociabilité s’est constituée pendant près d’un demi siècle”. L’écrivain d’expliquer comment se fit la rencontre avec ceux qui “revendiquent une manière d’habiter ensemble, une vie, une dignité” : c’était à l’occasion des Journées du patrimoine, il y a deux ans. L’anthropologue travaillait alors avec l’agence Hors champs, sur les berges de la Rize, une exposition photos lui a fait découvrir Marhaba.

Et l’idée d’écrire un livre en toute liberté a surgi. La volonté d’inscrire sur le papier la mémoire de leur exil, “la marque commune de leur histoire” et leur indignation. Parce que les gens d’ici vivent mal la fin de vie de leur village. Ici, le transitoire a duré, au point qu’ils ont pris leurs marques et n’ont pas envie de quitter ce lieu.

La destruction prévue par le bailleur Aralis “va provoquer à nouveau le déplacement de ces habitants. C’est un nouveau projet d’exil qui leur est imposé”.

Maurice Charrier, maire honoraire présent à la rencontre, d’apprécier qu’il y ait une trace de cette histoire. Et de se poser la question aujourd’hui du bienfondé de la démolition de ces logements. “Je pense qu’il faut devenir un peu plus inventif quand il s’agit de définir le devenir de cités comme celle-ci. Il y a trois ans, je n’étais pas au fait de certaines expériences. Depuis, j’ai vu des interventions, notamment en Amérique latine, qui permettent d’améliorer sans détruire, qui mettent en œuvre aussi le principe d’auto construction... ”. Pour Marhaba, il semble qu’il soit trop tard. Il ne restera que la mémoire.

Fabienne Machurat

Marhaba Parages intranquilles, éditions L’Harmattan, collection Mémoires d’exil, mai 2012. Prix : 13 euros.

Des berges du Rhône à celles de l’Amazone, Gérard Chabenat s’est intéressé aux populations riveraines des cours d’eau. Après les fleuves, les bords de la Rize et du canal de Jonage amènent l’anthropologue écrivain à rencontrer les gens de Marhaba.

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