Actualités / Démocratie locale - mardi 02 juillet 2013

“Les difficultés sociales nous donnent une responsabilité plus grande”

C’EST UN RAPPORT d’une trentaine de pages qui a été soumis au débat (sans vote) lors du conseil municipal du 26 juin. Le rapport d’observations de la chambre régionale de la Cour des comptes dresse un état des lieux de la commune et de sa gestion pour la période 2005 à 2011 et établit des recommandations. Ce type de contrôle est régulièrement effectué par la juridiction régionale, le dernier à Vaulx-en-Velin remonte à 2007.

Une population qui augmente mais toujours précaire

Premier constat : l’évolution de la population. La Cour reprend les chiffres de l’Insee selon lequel la commune comptait près de 41 000 habitants en 2012, contre 39 500 en 2008. “Cette augmentation marque une assez nette rupture par rapport aux évolutions passées, caractérisées par la stagnation ou la diminution de la population vaudaise”, fait remarquer la Cour. “Nous sommes même à 44 300 habitants selon le fichier Filocom”, fichier du logement communal issu des don- nées fiscales et foncières, a précisé le maire, Bernard Genin (Front de gauche). Pour la Cour, ces chiffres sont révélateurs de ”l’amélioration globale des conditions de vie des habitants, résultat de l’important programme de renouvellement urbain dont la ville bénéficie depuis plusieurs années”. Mais au-delà, la Cour ajoute que la précarité reste forte, en lien avec un taux de chômage d’environ 23 % en 2012 : “Les écarts de richesse avec le reste de la population du département demeurent importants et ne tendent guère à se réduire”.

Ce qui a fait dire à Philippe Moine, du groupe Réussir ensemble Vaulx-en-Velin (Revv) : “Il y a tant et tant d’éléments sur lesquels nous n’avons cessé de vous interpeler. Ce rapport remet en cause l’essence même de vos choix poli- tiques : la solidarité. Alors que la précarité ne diminue pas”. Pour l’élu, la Ville a créé “un appel d’air de toujours plus de social”. Oui, a répondu le maire, “les gens ont de plus en plus de difficultés. Le revenu moyen à Vaulx-en-Velin est 40 % moins élevé que dans le Rhône et ça nous donne une responsabilité encore plus importante vis-à-vis de notre population”.

Une faible capacité d’autofinancement

La Cour a ensuite évalué la capacité d’autofinancement de la commune, ce qui “permet d’apprécier dans quelle mesure les ressources ne sont pas mobilisées par les charges et sont ensuite disponibles pour rembourser la dette et pour investir”. Elle constate à Vaulx-en-Velin une capacité d’autofinancement faible : elle représente moins de 18 % des dépenses d’équipement. Le reste étant financé avec des subventions et des emprunts. Pour rembourser sa dette, la Ville devrait payer pendant 11 ans, sans investir par ailleurs et se rap- proche ainsi du seuil limite de désendettement fixé autour de 12 à 14 ans. Toutefois, note la cour, la structure de la dette n’est que peu risquée.
Voilà qui montre “que la Ville n’a pas la capacité à se désendetter et sa politique ambitieuse d’investissement est pure folie, a commenté Philippe Moine. Nous n’avons plus les moyens d’emprunter”. De son côté, Hélène Geoffroy, pour le Parti socialiste (PS), a pointé “des marges de manœuvre qui se réduisent au fil des ans” et a aussi interrogé le maire, tant sur les investissements : “La Ville a-t-elle les moyens de sa politique d’investissement jusqu’en 2017 ?”, que sur le fonctionnement : “Nous ne contestons pas la nécessité de personnel pour accompagner les politiques publiques mais ne pouvons-nous rationnaliser nos autres charges de fonctionnement ?”.
Vision toute différente pour le maire, qui leur a répondu : “Ce rapport ne remet pas en cause nos choix politiques, ce n’est pas son rôle”. La Cour régionale des comptes “dit que nous progressons et nous devons nous en féliciter. Sur ce mandat, l’investissement a doublé. Le seul bémol : la Cour dit qu’on n’a pas les moyens de continuer. Si on veut pour- suivre notre développement, il faut des moyens supplémentaires”. Complétant les propos de Bernard Genin, son Premier adjoint chargé des Finances, Saïd Yahiaoui, a repris en quelques éléments la situation : “Le renouvellement urbain n’est pas terminé et dans le même temps, est engagé un processus de développement”. Processus “partagé par l’ensemble de nos partenaires et il faut l’effort de tous pour continuer ce développement, a ajouté Bernard Genin. Nous n’avons pas les moyens d’investir seuls. Si nos partenaires ne suivent pas, alors nous ne pourrons pas poursuive ce développement”.

Passation de marchés et petite enfance

Dans ses recommandations, la Cour régionale des comptes a aussi souligné la nécessité pour la Ville d’être plus vigilante sur les passations de marchés publics. Elle a particulière- ment étudié les marchés relatifs aux travaux des écoles Langevin et Mistral et du gymnase Jesse-Owens, pour lesquels les délais prévisionnels d’achèvement ont été dépassés de quelques mois, notamment à la suite de faillite des entreprises prestataires. La Cour a donc conseillé à la Ville d’être attentive à des offres anormalement basses ainsi qu’aux retards de travaux.
Elle a en outre réalisé son contrôle sur la politique de la petite enfance, dans le cadre d’une enquête nationale sur le sujet. Elle a étudié le pilotage de la politique d’accueil de la petite enfance, l’offre d’accueil, l’admission dans les établissements, le coût du service rendu et la scolarisation des enfants de deux ans. Et a conclu que “la commune a notablement renforcé son action en augmentant son offre d’accueil pour mieux répondre aux besoins de la population”. Mais elle note aussi qu’il lui reste à élaborer un outil de pilotage, ainsi que des indicateurs mesurant l’efficacité de cette politique. Dans le domaine de l’accès aux écoles maternelles des enfants de deux ans, “non obligatoire et qui relève d’abord de la compétence de l’Etat”, la Cour a souligné que la commune n’a pas développé d’actions spécifiques et que la coordination avec les servi- ces de l’Etat et les directeurs d’écoles reste limitée.

Ce qui a fait dire à Hélène Geoffroy : “Nous ne sommes pas capables de faire des prospectives, ni de travailler en partenariat”. Les chiffres parlent pourtant d’eux-mêmes : depuis 2008, vingt-trois classes ont été ouvertes dans les écoles, auxquelles il faut ajouter huit classes créées à la rentrée 2012-2013 et une prévision de six classes l’année prochaine. Et une trentaine de places sera créée en crèche d’ici à fin 2013, soit une augmentation de 40 % depuis 2008.

Quatre recommandations

La Cour régionale des comptes préconise donc de donner une plus grande portée au débat d’orientation budgétaire avec la programmation pluriannuelle d’investissement. Elle conseille aussi de soumettre aux élus la question des abattements facultatifs de la taxe d’habitation ; de mettre en place une procédure de règlement financier des marchés publics préservant mieux les intérêts de la commune ; d’élaborer un outil de pilotage de la politique d’accueil de la petite-enfance et des indicateurs d’évaluation. Des recommandations somme toute assez banales au regard de l’importance du budget de la Ville et des grands projets menés sur la commune.

Edith Gatuing

 

 

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