Archives / Journal N°42 - mardi 20 décembre 2011

Rencontres du logement social : qui peut faire quoi ?

8767 logements, 13 bailleurs... Le logement social à Vaulx-en-Velin concerne plus de la moitié de la population de la commune. Le forum qui lui était consacré, le jeudi 15 décembre au centre culturel Charlie-Chaplin est venu le rappeler. Dans la salle, habitants, représentants de trois bailleurs, associations de locataires et élus ont échangé pendant plus de deux heures. Longtemps, les HLM ont représenté presque 70 % de l’habitat vaudais. En quête de davantage de mixité, la municipalité a depuis quelques années fait le choix de baisser ce taux pour le ramener à 50 %, tout en maintenant le nombre de logements sociaux. Ce forum participait aussi de la volonté de la municipalité d’impliquer les bailleurs dans la construction de la commune. Habitants et locataires ont multiplié les questions, soulevant de nombreux problèmes : prix du chauffage trop élevé, tout comme les loyers, difficultés à se reloger... Ainsi Patrice Tillet, directeur général d’Alliade habitat, face au cas d’une personne dont le loyer augmenterait de 100 euros si elle acceptait la proposition de relogement qui lui était faite, a assuré qu’il n’était “pas obligé de l’accepter”. Certains ont regretté que la loi n’oblige pas les organismes HLM à rendre leurs comptes publics. “Nous les présentons chaque année au conseil d’administration où sont présents des représentants de locataires”, a souligné Cédric Van Styvendael, directeur général de Villeurbanne Est habitat. Son homologue de l’Opac du Rhône, Philippe de Mester assurant qu’ils figuraient sur leur site Internet et que quiconque pouvait demander à les consulter.

Le maire, comme les associations de locataires ont déploré le désengagement de l’Etat dans ce domaine. Selon l’association régionale des organismes d’HLM de Rhône-Alpes, le plan de rigueur du gouvernement ponctionnerait même 22 millions d’euros aux bailleurs sociaux de la région. “La part du logement social diminue chaque année dans le budget du ministère du logement”, a lancé une Vaudaise. Ce manque d’investissement, un coût de la construction en augmentation, sans oublier le non respect de la loi SRU (Solidarité et renouvellement urbains) par certaines communes qui préfèrent payer des amendes plutôt que d’accueillir davantage d’HLM, font qu’au niveau national 1,3 million de demandes de logement sont en attente. Tous se sont accordés : il faut construire davantage, de manière équilibrée sur l’ensemble du territoire et surtout trouver de nouveaux financements pour que l’habitat soit de qualité et abordable pour tous. “La charge contre le logement social remonte aux années 70. Il y avait plus de diversité, on l’a petit à petit réservé aux plus pauvres. Pourtant ce fut un élément de progrès, social et urbanistique, un gain en confort. Malheureusement, il est devenu une charge financière. Il faut se battre pour inverser la tendance. Nous demandons aux élus de mener cette bataille”, a insisté Jean-Pierre Brunel, militant bien connu à Vaulx. Que faire ? Les communes doivent-elles se substituer à l’Etat défaillant ? Propositions et interrogations, de la Ville comme des habitants, qui ont émergé au cours des échanges, seront envoyées aux candidats à l’élection présidentielle de 2012.

Stéphane Legras

Les préoccupations des locataires au cœur des débats

Plus de demandes que d’offres

“Il y avait en 2009, 2813 demandes en attente sur la commune, soit une augmentation de 13 % depuis 2003. 58 % des ménages demandeurs sont originaires de Vaulx, rappelait le Premier magistrat de la ville. En France, 1,3 million de demandes sont en attente et dans le Grand-Lyon 50 000 demandes ne sont pas satisfaites. A Vaulx-en-Velin, nous allons continuer à construire du logement social pour ne pas baisser leur nombre dans le renouvellement urbain. Et atteindre les 50% au lieu des 40 initialement prévus”.

Une personne membre d’une commission d’attribution de logement a avancé une autre raison pouvant expliquer ces chiffres. “Les logements sont attribués aux personnes prioritaires, celles bénéficiant de la loi Droit opposable au logement (Dalo) et d’un relogement dans le cadre des opérations de renouvellement urbain. Du coup, les demandes classiques passent en dernier et cela bloque le système”.

L’augmentation des loyers

“Le prix des loyers est régi par des règles très strictes, expliquait Philippe de Mester, directeur général de l’Opac du Rhône. Nous sommes sans cesse contrôlés par les différents services de l’Etat. Nos locataires ont accès aux APL (aides personnalisées au logement). Dans le parc social neuf, le prix du loyer au mètre carré oscille entre 5 et 5,50 euros. A titre de comparaison, dans le privé cela peut aller jusqu’à 11 euros. Toutefois pour les ménages les plus modestes, il existe des résidences plus anciennes, peut-être un peu moins confortables. Mais le loyer reste plus accessible, autour de 3 à 3,5 euros le mètre carré”.

Le coût du chauffage

“La Ville a demandé à changer son mode de chauffage et passera à 60% de chauffage au bois, expliquait le maire. C’est un gain environnemental mais aussi économique. Avec une baisse des factures comprise entre 15 et 30% par rapport aux autres combustibles. Ce passage se fera dans un an et demi. L’opérateur actuel est la société Cofely qui détient le marché jusqu’en 2017. Nous sommes en discussion avec le Grand-Lyon pour que la compétence du chauffage soit de son ressort”, poursuivait-il. A ce sujet, quelques habitants ont regretté le recours à une société privée. “Comme pour l’eau, nous sommes pour le retour à une régie publique. Nous négocions en permanence avec les promoteurs pour qu’ils raccordent leurs nouvelles constructions au réseau“, leur a répondu l’élu. Le coût global serait alors partagé en davantage de parts. La facture de chaque habitant serait ainsi mécaniquement réduite.

Rochdi Chaabnia

La CNL retrouve son agrément... mais pas ses subventions

L’Etat a tenté de museler la Confédération nationale du logement (CNL) en ne renouvelant pas son agrément d’association de consommateurs pour 2011. Car sans agrément, point d’action en justice pour défendre les locataires et consommateurs. “Cette situation est pour le moins incompréhensible, s’étonnait le maire, Bernard Genin, dans un courrier adressé fin juillet au ministre du Commerce et de la Consommation. La CNL aide au quotidien les familles vaudaises afin de résoudre leurs difficultés qui, hélas, ne vont pas en se réduisant”. Lutte pour le logement social, défense des locataires, animation des comités de locataires... c’est tout un travail de terrain que fait la CNL pour défendre les droits des habitants. Si le gouvernement vient de revenir sur sa décision en attribuant à nouveau l’agrément à la confédération, les subventions, elles, pourtant liées à l’agrément, n’ont pas été attribuées. “Une manière d’économiser 270 000 euros au niveau national, 4300 euros pour le Rhône, explique Joëlle Blanluet, présidente de la fédération du Rhône de la CNL. Et de nous empêcher de fonctionner”. Mais la CNL et ses quelque 69 000 membres (ils sont 300 à Vaulx-en-Velin avec 25 comités de locataires) agit toujours contre le désengagement de l’Etat dans l’aide au logement social. Et au plus près des habitants.

Résidence Valéry : des locataires en colère

Le 2 décembre un grand nombre de locataires de la résidence Valéry A s’est rassemblé devant l’allée 9 du chemin Paul-Eluard. Ils habitent dans ces bâtiments construits en 1975 comptant 7 allées et 153 logements. A l’appel du comité de locataires récemment créé et affilié à la Confédération nationale du logement, ils ont voulu dire leur mécontentement. “Dans l’allée 7, où il y a quinze étages et deux ascenseurs, nous sommes restés douze jours sans ascenseur. Des locataires sont allés se plaindre à la mairie. Le lendemain un des deux appareils était réparé !”, s’indigne un résident. “Cette allée est occupée par un grand nombre de personnes âgées qui se sont retrouvées coincées chez elles”, déplore un autre. “J’ai une fille handicapée qui passe les week-ends chez nous, elle est en fauteuil et j’ai dû faire appel aux pompiers pour lui faire monter et descendre les huit étages !”, décrit son voisin.

Par ailleurs, l’ensemble des locataires se plaint du chauffage : “Nous avons froid. Chaque hiver c’est pareil. Tout le monde est obligé d’avoir un ou plusieurs chauffages d’appoint”, dit une habitante. “Nous en avons quatre”, confirme un couple âgé. “Une nuit, j’ai relevé 15 degrés dans une chambre et 16 dans le salon”, renchérit le président du comité de locataires, Georges Wazin. Ce dernier a fait venir un technicien de Cofely : “Selon lui, le dysfonctionnement est lié aux problèmes d’isolation et de joints de fenêtres. De l’air rentre dans les appartements”. Outre les frais de chauffage qui représentent une part importante des charges, “les appareils individuels font grimper les factures d’électricité”, souligne le président de la section CNL de Vaulx-en-Velin, Benito Sangrigoli. D’autres problèmes sont listés : plus d’éclairage depuis deux mois dans l’entrée de l’allée 7, volets vétustes et cassés, infiltrations, moisissures, balcons qui se dégradent, rats dans les caves ... “Alliade a commencé des travaux de façade, mais qu’est ce qui est prévu pour traiter les problèmes dans les logements?”, interroge une habitante.

Neuf mois de travaux

Le mécontentement s’exprime à l’heure où le bailleur réalise des travaux de rénovation. Le chantier a démarré à l’automne. L’intervention sur les façades est engagée au niveau de l’allée 1. Elle va se poursuivre jusqu’en juillet 2012 (allée 9). Le programme “répond aux attentes des locataires : lutte contre l’humidité et amélioration de l’isolation”, spécifie le bailleur. Dans le détail, les travaux concernent l’étanchéité et la sécurisation des terrasses, l’imperméabilisation et le ravalement des façades, la fermeture partielle des balcons, l’installation de paraboles collectives, le remplacement des combinés d’interphone, le remplacement des fenêtres, des portes fenêtres et des volets. Leur coût s’élève à 1,268 million d’euros. Ils n’entraîneront pas d’augmentation de loyer assure le bailleur.

Du point de vue d’Alliade, les problèmes répétés d’ascenseurs “semblent avoir mis le feu aux poudres”. “Nous sommes, eux comme nous, face à un problème récurrent de vandalisme sur les ascenseurs de la résidence, principalement aux allées 7 et 9”, expose le gestionnaire en rappelant que les appareils ont été modernisés il y a 3 ans pour un coût de 130 000 euros. Mais allée 7, c’est problématique : l’an dernier, un des ascenseurs a brûlé (coût de la restauration : 30 000 euros). Il est régulièrement dégradé et il a été totalement vandalisé voilà près d’un mois. L’autre a été mis à l’arrêt quelques jours, son moteur de porte ayant été arraché. Le bailleur de regretter la gêne occasionnée mais d’en appeler à “la bonne volonté de tous pour respecter le bon fonctionnement des ascenseurs”.

F.M

Quelques chiffres à Vaulx

Nombre de logements : 15 325

Logements sociaux : 8767

545 logements en résidences étudiantes

431 logements en foyers et résidences sociales

Parc social : 56,4%

Données établies par le recensement en 2007 et le service habitat en 2011

Après les transports, la circulation ou le stationnement, c’est le logement social qui était au cœur d’une réunion publique, le jeudi 15 décembre au centre culturel Charlie-Chaplin. Elus, habitants, bailleurs et associations de locataires ont dressé le bilan d’une situation problématique, où les manques de l’Etat, les crédits en baisse et la hausse des loyers et du coût du chauffage ont été pointés.

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