Archives / Journal N°47 - mardi 06 mars 2012

Témoignage : “Malgré sa mort, le système du colonel Kadhafi se perpétue en Lybie !”

Vous n’avez pas été opposant dès l’arrivée de Kadhafi ?

En 1969, son putsch aurait dû déboucher sur une démocratie. Mais en 75 la Libye est devenue un pays sans constitution et sans pouvoir juridique. Petit à petit Kadhafi a détruit la société civile à partir d’interdits. Les années 80 se sont déroulées dans la peur. Se regrouper à plus de trois était passible de prison.

Vos origines berbères ont fait de vous un opposant.

Oui, le régime niait tout ce qui n’était pas arabe et musulman. J’ai toujours travaillé sur l’identité berbère de ma région d’origine, les montagnes de Neffoussa. La culture berbère représentait la première force d’opposition à Kadhafi. En la défendant, notamment en publiant un magazine clandestin “le Jour”, je suis effectivement devenu un opposant. J’ai fait deux fois de la prison. Je me suis exilé en poursuivant mes activités, par exemple dans un journal publié par des opposants au régime de Kadhafi en Angleterre.

Comment avez-vous réagi, il y a un an, avec les révolutions tunisienne et libyenne ?

Depuis février 2011, j’ai effectué 15 voyages dans la région. J’ai aussi créé dans l’urgence une association humanitaire et culturelle, pour y amener des livres, des médicaments, du matériel médical et alimentaire.

Et l’avenir ?

85% des Libyens étaient d’accord pour renverser Kadhafi mais ils ne le sont pas sur ce qu’il faut mettre à la place ! Lors de mes voyages j’ai fait des conférences, rencontré de nombreuses personnes pour construire une communauté de réflexion sur ce que l’on pouvait faire maintenant. Une révolution se construit, il faut se donner le temps d’analyser la situation. D’autant que malgré sa mort, le système Kadhafi se perpétue avec une marginalisation des berbères. Si le peuple y est prêt à quitter le panarabisme, les élites ne le sont pas. Et alors que la religion doit rester de l’ordre de l’intime, le pays ne peut pas accepter d’autre religion que musulmane alors que dans les années 70 il y avait encore des chrétiens ou des juifs.

Et vous, vous sentez-vous libyen, français ou berbère ?

Un peu tout ! On ne peut pas se construire sans avoir une identité. Je n’ai eu de cesse de faire connaître la culture berbère, au sein d’associations, dans des publications en participant à des congrès ou même en éditant des poèmes.

Moussa Harim est né en Lybie, qu’il a quittée à 25 ans, en 1982. Opposant au régime de Kadhafi, il a rapidement obtenu l’asile politique à son arrivée en France. Installé depuis de longues années à Vaulx-en-Velin, défenseur acharné de la culture berbère, il a fondé une association humanitaire au début de la révolution libyenne qui débouchera sur la mort du dictateur. Et maintenant ? Pistes de réponses.

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